Mémorial des Policiers français Victimes du Devoir

« Il y a quelque chose de plus fort que la mort,
c’est la présence des absents dans la mémoire des vivants. »

Jean d’ORMESSON

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Gardien de la paix

Jean-Michel JAMME

Victime du Devoir le 18 juillet 1980

Département

Hauts-de-Seine (92)

Affectation

Sécurité Publique (PP) — Nanterre — Compagnie Départementale d'Intervention

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Circonstances

Cause du décès

Assassinat, exécution ou extermination
Homicide par arme à feu

Contexte

Guerre — Terrorisme

Au cours de la matinée du vendredi 18 Juillet 1980, quatre gardiens de la paix de la Compagnie Départementale d’Intervention des Hauts de Seine étaient chargés de garder et surveiller le domicile de M. Shapour Bakhtiar, dans les appartements de sa fille situés au 101 Boulevard Bineau à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine).

A la fin des années 1970, M. Bakhtiar, alors dernier premier ministre du Chah d’Iran, organisait le Mouvement de Résistance Nationale Iranienne pour lutter contre la mouvance islamiste radicale menée par l’ayatollah Khomeini, alors sur le point de renverser le régime. En septembre 1979, le tribunal islamique le condamnait à mort, arguant que chacun peut exécuter le “jugement de Dieu” même hors du champ juridique. Bakhtiar se réfugiait en France avec sa famille, et son domicile placé sous surveillance constante.

Vers 8h30, trois prétendus journalistes équipés du matériel équivoque et de fausses cartes de presse, engagèrent la discussion avec les deux policiers de faction à l’entrée de la résidence. Bien que victime de menaces depuis un an, M. Bakhtiar reçoit néanmoins des journalistes et des personnalités ; l’un des policiers les accompagna jusqu’à l’entrée de l’immeuble et prévint par interphone ses deux collègues à l’étage.

Le seul journaliste qui s’exprimait parfaitement en français prétexta une claustrophobie et indiqua qu’il préfèrait emprunter les escaliers. Les assassins abandonnèrent leurs matériels de journalistes et exhibèrent des pistolets Beretta munis de silencieux.

Pris d’un doute, le gardien de la paix Bernard Vigna, vingt-deux ans, les hèla à nouveau dans les escaliers car les visites ne doivent jamais commencer avant 9h. Surpris dans leurs préparatifs, les terroristes ne laissèrent aucune chance au jeune policier et l’exécutaient froidement.

Touché au larynx, aux poumons et à la colonne vertébrale, ils le laissèrent pour mort. Tout s’accélèra. Les terroristes se ruèrent au quatrième étage ; ils tuèrent le gardien de la paix Jean-Michel Jamme, vingt-trois ans, et blessèrent très grièvement son collègue Georges Marty à la tête.

La voisine de palier, Yvonne Stein, quarante-cinq ans, était abattue sur le champ alors qu’elle ouvrait sa porte. Viviane Stein, sa soeur âgée de trente-sept ans, était grièvement blessée.

Constatant leur erreur, les assassins se présentèrent à la bonne porte, qui avait la particularité d’être blindée. Alors incapables de pénétrer dans l’appartement, l’un des tueurs subtilisa le pistolet mitrailleur des policiers et tira à sept reprises dans la porte, en vain.

Ces tirs et les appels au secours alertèrent inévitablement le gardien de la paix Philippe Jourdain; vingt-cinq ans, qui réalisait la gravité de la situation. Il se rendait dans le hall de l’immeuble et constatait avec horreur que son équipier agonisait dans les escaliers. Il demandait du renfort par son poste émetteur et reprenait position à l’extérieur.

Les terroristes prirent la fuite et remarquèrent sa présence. Échange de coups de feu ; le jeune policier arma son pistolet-mitrailleur au coup par coup et parvint à blesser l’un des terroristes, puis à tenir en respect les autres en tirant au sol. Deux autres membres du commando furent interpellés dans un appartement relais, Rue Toullier, dans le 5ème arrondissement.

Le soir même, l’attentat fut revendiqué par les Gardiens de la Révolution Islamique. A la tête du commando meurtrier : Anis Naccache, trente-deux ans, libanais, militant anti-impérialiste pro-palestinien, converti au chiisme et maîtrisant parfaitement le français. Medhi Nejad Tabrizi, vingt-trois ans, iranien et Fawzi Mohamed El Satari, vingt-quatre ans, palestinien, l’ont accompagné jusqu’au domicile de Bakhtiar. Salah Eddine El Kaara, vingt-cinq ans, libanais, et Mohammad Jawad Jenab, vingt-cinq ans, iranien, étaient restés à l’extérieur pour couvrir l’opération.

Le 10 septembre, Valéry Giscard d’Estaing décora de la légion d’honneur le gardien de la paix Jourdain ; la cérémonie se tint au Palais de L’Élysée. Il fut nommé brigadier de police à titre honoraire, moins d’un an après sa titularisation au 1er échelon de gardien.

Le 10 mars 1982, la cour d’assises des Hauts de Seine condamna quatre des terroristes à la réclusion criminelle à perpétuité, et à vingt ans pour Jenab.

Le 27 juillet 1990, tous les membres du commando furent graciés par le Président de la République française dans le cadre d’une négociation entre la France et l’Iran. Dans cette perspective, l’avocat de Naccache avait suggéré de dédommager à hauteur de 4 millions de francs les familles des victimes en échange de sa libération ; la moitié de cette somme revenant au gardien de la paix Vigna. Ce dernier refusa catégoriquement cet argent sale, selon ses propres déclarations.

Le 6 août 1991, M. Bakhtiar fut finalement assassiné à son domicile, à Suresnes, par un commando venu de Téhéran.

Le 5 février 2008, le Capitaine de police honoraire Bernard Vigna, cinquante-et-un ans, décédait des suites des blessures qu’il a reçu cette dramatique journée de l’été 1980.

Biographie

Direction d'emploi

Préfecture de Police

Corps

Encadrement — Application

Type d'unité

Unité de l'Ordre Public — Sécurité Routière

Titres et homologations

Citation à l'Ordre de la Nation

Croix de la Légion d'Honneur

Né le 21 janvier 1957 (lieu de naissance ignoré) ; célibataire, sans enfant.
Cité à l’ordre de la Nation [1] ; nommé au grade de Chevalier de la Légion d’Honneur [2] ; promu brigadier de police à titre posthume.

Sources et références

BODMR n° 17 du 02/12/1980
[1]
[2] JORF n°172 du 25/07/1980, “Ordre national du mérite, décret portant nomination”
[3] JORF n°250 du 26 octobre 2005, “Arrêté portant inscription au tableau d’avancement de capitaine de police”
Article Le Monde du 29/07/1990 – Dix années d’un poker menteur…
Moi Iranien espion de la CIA et du Mossad Par Djahanshah Bakhtiar
Allocution de M. V. Giscard D’Estaing, Palais de l’Elysée, 10/09/1980
Archives INA du 18 et 19 Juillet 1980

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